Les conséquences d’un divorce sur l’entreprise d’un des conjoints dépendent du régime matrimonial choisi par les époux au moment du mariage (ou modifié en cours d’union) et de la forme de l’entreprise.
Les deux régimes matrimoniaux les plus couramment adoptés par les époux sont la séparation de biens ou la communauté légale (réduite aux acquêts), ce dernier régime étant le régime par défaut, si les époux ne signent pas de contrat de mariage au moment de leur union.
Le régime de la communauté légale est en général déconseillé lorsque l’un des époux exerce ou compte à court terme exercer une activité d’entrepreneur et il vaut mieux dans ce cas, anticiper au moment du mariage et signer un contrat de séparation de biens, régime plus protecteur des biens de chaque époux.
En séparation de biens, les époux ont chacun leurs revenus et peuvent les utiliser indépendamment de l’autre conjoint. Un époux qui investirait dans une entreprise avec ses deniers n’aurait ainsi pas de compte à rendre à l’autre époux et ce dernier ne pourrait rien revendiquer lors du divorce, par rapport à l’entreprise.
La valeur de cette dernière serait juste prise en compte dans ce cas pour évaluer le patrimoine du conjoint pour fixer une éventuelle prestation compensatoire mais a priori, l’entreprise elle-même serait sauve.
Si l’activité est créée durant le mariage et que la situation n’a pas été anticipée, que les époux sont alors mariés sous le régime légal de la communauté des biens, plusieurs possibilités sont envisageables pour protéger les biens des époux mais aussi ceux de l’époux entrepreneur et donc les intérêts de l’entreprise elle-même.
En effet, il y a deux types de difficultés qui peuvent survenir, une qui viendrait des créanciers de l’entreprise qui pourraient s’en prendre aux biens des époux, sans distinction et l’autre difficulté peut survenir de la mésentente des époux au moment du divorce qui peut mettre à mal l’entreprise elle-même.
La première précaution à prendre concerne déjà la forme de l’entreprise. Il vaut mieux opter, dans tous les cas, pour une forme sociétale, SARL ou SAS plutôt que pour une forme d’entreprise individuelle.
Ainsi, les biens des époux seront protégés des créanciers et seuls les biens de la société seraient saisissables éventuellement (sauf caution personnelle du dirigeant mais c’est un autre sujet…), les associés voyant leur responsabilité limitée à leur apport dans la société.
Dans tous les cas cependant, si rien n’est fait au départ dans les statuts, leconjoint non exploitant sera considéré comme propriétaire de 50% de l’entreprise (la moitié du fonds de commerce, des parts, titres ou actions de la société concernée).
Un dirigeant marié sous le régime légal prend alors trois risques majeurs
- Le conjoint non-exploitant peut revendiquer la qualité d’associé sur la moitié des parts sociales de l’entreprise jusqu’au prononcé définitif du divorce. Cela signifie qu’il peut paralyser les organes sociaux et exiger un droit de vote.
- Idem pour un associé marié sous le régime légal, il ne peut céder les parts dont il dispose sans l’accord de son conjoint, même si elles sont à son nom uniquement.
- En cas de divorce, le conjoint dirigeant ou associé devra racheter à l’autre la moitié des parts dont il souhaite disposer seul. Le calcul du prix de ces parts est souvent source de conflits, notamment quand le rachat impose l’endettement.
Il est possible de se prémunirdes effets d’un possible divorce lors de la rédaction des statuts constitutifs de l’entreprise.
Au moment de l’apport ou de l’acquisition des parts, l’associé peut se protéger en formalisant une renonciation à revendiquer la qualité d’associé par son conjoint, lequel s’engage donc à ne pas prétendre à des droits sur l’entreprise en cas de divorce du couple.
Certaines clauses insérées dans les statuts peuvent aussi permettre de protéger l’entreprise et ses actifs dans le cas d’un divorce de l’associé (ex. la clause d’exclusion ou clause d’agrément).
Néanmoins, ces clauses ne protègent que le fonctionnement quotidien de la société, le conjoint ne pourra pas intervenir dans le fonctionnement mais restera toujours la question de la valeur de ces parts sociales, qui seront et resteront communes. Il sera donc nécessaire de les évaluer au moment du divorce et la moitié de leur valeur devra être attribuée en principe à l’autre conjoint.
Une solution pourrait consister, en amont, s’il n’y a pas d’autres biens à ce moment-là ou qu’ils valent très peu, de changer de régime matrimonial, tant que la société ne vaut pas grand-chose, changement qui est assez simple et peu couteux. Dans ce contrat de mariage, rédigé par un Notaire, il est possible de prévoir des clauses spécifiques, relativement à l’entreprise justement, pour en protéger le fonctionnement.